Définition de VAIN, AINE

DÉFINITIONS - HISTORIQUE - ÉTYMOLOGIE - SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE -

Prononciation : vin, vè-n'

DÉFINITIONS

1
Proprement, vide, ce qui est le sens étymologique conservé seulement dans les locutions suivantes : vaine pâture, terres où il n'y a ni semences, ni fruits, et, par suite, où tous les habitants d'une commune peuvent conduire leurs bestiaux ; terres vaines et vagues, terres incultes qui ne rapportent rien.
Temps vain, temps bas et couvert, accompagné d'une chaleur étouffante (locution vieillie).
Sémantique : Terme de vénerie. Fumées vaines, ou, substantivement, les vaines, fumées des bêtes fauves, qui sont légères et mal pressées.
2
Sémantique : Fig. Qui est comme vide, qui n'a qu'une apparence.
Non, ce n'est pas une vaine ombre ! je le tiens, je l'embrasse, mon cher Mentor
de François de Salignac de La Mothe FÉNELON dans Tél. IV
L'éloquence d'Iphicrate est pompeuse et vaine, celle de Timothée plus simple et plus persuasive
de Auguste Marseille BARTHÉLEMY, dit L'ABBÉ BARTHÉLEMY dans Anach. ch. 7
Chez les Grecs, lorsque l'éloquence devint oiseuse, elle fut vague et vaine
de Jean-François MARMONTEL dans Oeuvres, t. IV, p. 372, dans POUGENS
3
Qui est sans valeur.
être brave [bien mis] n'est pas trop vain ; car .... c'est montrer par ses cheveux qu'on a un valet de chambre, un parfumeur ; par son rabat, le fil, le passement....
de Blaise PASCAL dans Pens. V, 12, édit. HAVET.
Tout est vain en l'homme, si nous regardons ce qu'il donne au monde ; mais au contraire tout est important, si nous considérons ce qu'il doit à Dieu
de Jacques-Bénigne BOSSUET dans Duch. d'Orl.
Quittez ces vains plaisirs dont l'appât vous abuse
de Nicolas BOILEAU-DESPRÉAUX dans Sat. IX
De la Grèce déjà vous vous rendez l'arbitre : Ses rois, à vous ouïr, m'ont paré d'un vain titre
de Jean RACINE dans Iphig. IV, 6
Peut-être un songe vain m'a trop préoccupée
de Jean RACINE dans Athal. II, 5
Oh ! qu'il me paraît vain et frivole ce monde que vous quittez !
de Stéphanie Félicité Ducrest de St-Albin, comtesse de GENLIS dans Mères riv. t. III, p. 354, dans POUGENS
Il se dit quelquefois, en ce sens, des personnes.
Il [l'homme] est si vain, qu'étant plein de mille causes essentielles d'ennui, la moindre chose, comme un billard et une balle qu'il pousse, suffisent pour le divertir
de Blaise PASCAL dans Pens. IV, 1
Qui ne voit pas la vanité du monde, est bien vain lui-même
de Blaise PASCAL dans ib. VI, 59 bis.
Et vains, ils [les hommes illustres du paganisme] ont reçu une récompense aussi vaine que leurs désirs
de Jacques-Bénigne BOSSUET dans la Vallière.
Sémantique : Terme de manége. Cheval vain, celui qui est faible par trop de chaleur ou d'ardeur, ou pour avoir pris quelques remèdes.
4
Qui est sans effet. De vains efforts.
Daignent les justes dieux rendre vain ce présage !
de Pierre CORNEILLE dans Rodog. III, 6
Sa vaine inimitié n'est pas ce que je crains
de Jean RACINE dans Phèdre, I, 1
5
Sans talent, sans succès.
Imite mon exemple, et lorsqu'une cabale, Un flot de vains auteurs follement te ravale....
de Nicolas BOILEAU-DESPRÉAUX dans Ép. VII
6
Qui n'a aucun fondement raisonnable, sérieux.
Ils les mettent [les vers de certains poëtes] au rang des plus vaines sornettes
de Abbé Mathurin RÉGNIER dans Sat. IV
Grâces aux dieux, Cinna, ma frayeur était vaine ; Aucun de tes amis ne t'a manqué de foi
de Pierre CORNEILLE dans Cinna, III, 4
Le Seigneur connaît les pensées des hommes ; et il sait qu'elles sont vaines
de Isaac Louis Lemaistre de SACY dans Bible, Ps. XCIII, 11
Toutes les vaines excuses dont vous couvrez votre impénitence vous vont être ôtées
de Jacques-Bénigne BOSSUET dans Anne de Gonz.
L'espérance la plus vaine Flatte un malheureux amant
de QUIN. dans Phaét. V, 3
Combien nos jugements sont injustes et vains !
de François-Marie Arouet, dit VOLTAIRE dans Tancr IV, 6
7
Qui se prise au delà de son mérite.
Te mesurer à moi, qui t'a rendu si vain, Toi qu'on n'a jamais vu les armes à la main ?
de Pierre CORNEILLE dans Cid, II, 2
Cette femme ambitieuse et vaine croit valoir beaucoup quand elle s'est chargée d'or, de pierreries....
de Jacques-Bénigne BOSSUET dans la Vallière.
Un homme vain trouve son compte à dire du bien ou du mal de soi
de Jean de LA BRUYÈRE dans XI
Celui qui s'empresse pour se faire honorer, ne sait pas encore l'art d'être vain
de Jean-Baptiste MASSILLON dans Orais. fun. Villars.
Les nations libres sont superbes ; les autres peuvent plus aisément être vaines
de Charles-Louis de Secondat MONTESQUIEU dans Esp. XIX, 27
Vous voyez que je vous ai deviné ; et voilà ce qui me rend si vain
de François-Marie Arouet, dit VOLTAIRE dans Lett. Chauvelin, 17 oct. 1762
Nous en savons assez pour être sage et point assez pour être vains
de Charles BONNET dans Paling. XIII, 8
Son bon naturel l'empêchait d'être vaine, c'est-à-dire sotte
de COMTE DE CAYLUS dans Cadichon, Oeuv. t. IX, p. 402
Il est deux choses que les hommes vains ne trouvent jamais trop fortes, la flatterie pour eux-mêmes, la médisance contre les autres
de Jean-François MARMONTEL dans Oeuv. t. VI, p. 149
Vaine gloire, orgueil, infatuation.
Nature : Substantivement. Faire le vain, se livrer à la vaine gloire.
Et dans ces grands tombeaux, où leurs âmes hautaines Font encore les vaines, Ils sont mangés des vers
de François de MALHERBE dans I, 3
Je puis dire, sans faire le vain, que les folies de mon enfance ont été plus sérieuses que ces belles fleurs de rhétorique
de Jean-Louis GUEZ de BALZAC dans liv. I, lett. 17
Hélas ! et croyez-vous que l'on se mette en peine De ce nombre d'amants dont vous faites la vaine ?
de Jean-Baptiste POQUELIN, dit MOLIÈRE dans Mis. III, 5
8
En vain, Nature : loc. adv. Inutilement.
Les princes et les peuples gémissaient en vain ; en vain Monsieur, en vain le roi même tenait Madame serrée par de si étroits embrassements ; elle leur échappait....
de Jacques-Bénigne BOSSUET dans Duch. d'Orl.
Avant lui [Louis XIV], la France, presque sans vaisseaux, tenait en vain aux deux mers
de Jacques-Bénigne BOSSUET dans Mar.-Thér.
Les empereurs grecs avaient oublié que ce n'était pas en vain qu'ils portaient l'épée
de Charles-Louis de Secondat MONTESQUIEU dans Esp. VI, 21
Dieu ne fait rien en vain ; il a donné aux bêtes les mêmes organes de sentiments qu'à moi ; donc, si les bêtes n'ont point de sentiment, Dieu a fait ces organes en vain
de François-Marie Arouet, dit VOLTAIRE dans Mél. litt. au P. Tournemine.
Prendre le nom de Dieu en vain, l'employer dans un serment sans nécessité.

HISTORIQUE

1
XIIe s.
Tu hais les guardanz vanitez en vain
dans Liber psalm. p. 36
Si suens coups [son coup] n'ala pas en vain
dans Grégoire le Grand, p. 62
Ne sont que trois matieres [de poëme] à nul home entendant, De France, de Bretaigne et de Rome la grant ; Li conte de Bretaigne sont si vain et plaisant ; Cil de Rome sont sage et de sen [sens] aprenant
dans Sax. I
2
XIIIe s.
Et quant ge vin de pasmoison, Et j'oi [j'eus] mon sens et ma roison, Je fui moult vains [faible]....
dans la Rose, 1711
Et vint [Blondel] droit au castiel où li rois [Richard] estoit en prison, et se hieberga ciès [chez] une vaine feme
dans Chr. de Rains, p. 53
Leofreiz amis, icest secrei Vus prie, à humme pas ne cunte ; Kar vus ne seriez creüz, U veins [sans connaissance] vus seriez tenus
dans Éd. le Confesseur, v. 2561
En vaine gloire de ce monde
de Jean, PRINCE DE JOINVILLE dans 295
3
XIVe s.
Leur prieres churent en vain
de Pierre BERCHEURE dans f° 45, verso.
Laquelle Perenelle qui estoit lasse et vaine, tant pour ce qu'elle n'avoit mangié de tout le jour, comme pour ce qu'elle estoit malade
de Victor Henri-Joseph Brahain, dit DU CANGE dans vanitas.
4
XVe s.
Je dy en pleurant tendrement : Ce monde n'est pas chose vaine
de Charles D'ORLÉANS dans Ball. 61
5
XVIe s.
D'aller après, Françoys ne furent vains [nonchalants]
de Jean des Mares ou Des Marets, dit Jean MAROT dans V, 27
Sont reputées vaines pastures les terres non ensemencées et les prez non clos, les terres vacantes non labourées....
dans Nouv. coust. gén. t. II, p. 1073

ÉTYMOLOGIE

1
Provenç. van, va ; catal. va ; espagn. et ital. vano ; portug. vão ; du lat. vanus ; comparez le goth. vans ; anc. scand. vanr, défectueux.

SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE

1
Sémantique : Terme de forestier. Semence vaine, semence qui ne germe pas.
Il est prudent de rejeter les premières semences tombées : elles sont généralement piquées ou vaines
de G. BAGNERIS dans Manuel de sylvicult. p. 232, Nancy, 1873

Termes proches de VAIN, AINE